Préface du docteur Patrick THEILLIER
Ancien responsable du Bureau des Constatations Médicales
Préfacer
un livre de Bernard Legras à la suite de toutes les personnalités remarquables
qui ont préfacé ses nombreux ouvrages n’est pas chose aisée… Néanmoins, étant
un fervent admirateur de saint Paul dans les épitres duquel je trouve toujours
inspiration, je me fais une joie de revenir sur cet épisode charnière de la vie
de ce grand apôtre qui a été à l’origine de la diffusion de la Bonne Nouvelle,
l’Evangile du Christ, dans tout le bassin méditerranéen, au point qu’on l’a surnommé
« l’apôtre des nations ».
Le
plus étonnant, c’est qu’il n’a pas connu Jésus de son vivant ! Il fallait
donc qu’il le rencontre, ou « qu’Il le rencontre » car l’initiative
vient bien de Dieu. Saul, puisque tel était son nom juif, se décrivant lui-même
comme « un parfait pharisien », n’avait qu’une idée en tête :
persécuter ces renégats qui abandonnaient la religion juive en se disant
disciples de Jésus-Christ, pour éliminer cette « secte ».
Or,
voici que caracolant sur le chemin de Damas, envoyé en mission par le
grand-prêtre qui avait remarqué le zèle de Saul pour combattre ce qu’il
considérait comme une hérésie, il tombe soudainement de cheval… Lui qui était
en route pour lutter activement contre les juifs convertis à Jésus-Christ (il
venait d’assister au martyre d’Etienne), voici qu’il est terrassé par Jésus qui
se révèle à lui comme « celui que tu persécutes ». Il semble avoir
été ébloui par « une lumière venant du ciel », au point d’ailleurs
qu’il en perd la vue.
Cette
lumière divine n’est-elle pas celle de l’Esprit-Saint, lui qui se manifeste de
diverses façons ? C’est ce que va confirmer Ananias
qui imposera les mains et baptisera Paul, resté trois jours sans voir, sans
manger et sans boire, le temps d’une « résurrection ». Il n’est plus
le même homme : « Sans plus attendre, il proclamait Jésus dans les
synagogues, affirmant qu’Il est le Fils de Dieu » relate les Actes (Ac. 9, 20), « déconcertant tous ceux qui l’entendaient ».
On
ne peut rêver de miracle plus éclatant !
Miracle ?
Pour nos contemporains, un miracle, c’est l’inattendu qui survient et qui fait
le scoop… Gagner au loto est un miracle… Il concerne aussi la santé, comme la
guérison d’une maladie incurable. C’est, en effet, la première acception des
miracles. Ainsi en est-il des miracles que l’on constate à Lourdes. Un miracle,
pour le monde, c’est l’impossible ou l’improbable qui se réalise. Mais c’est
nettement insuffisant : on en reste seulement au « prodige ». Il
faut être conscient qu’il n’y a véritablement miracle que dans « un fait extraordinaire où l’on croit
reconnaitre une intervention divine bienveillante, auquel on confère une
signification spirituelle » (définition exacte extraite du Petit Robert).
A
Lourdes où je devais juger des guérisons déclarées, je me suis battu pour qu’on
ne se focalise pas sur le physique mais pour ouvrir la réalité du miracle à
cette dimension spirituelle qu’on a tendance à oublier ou à occulter. De fait,
j’ai toujours tenu à ce qu’une guérison ne puisse être qualifiée de miraculeuse
que si elle remplit deux conditions : échapper aux lois habituelles de la
médecine ou de l’évolution des maladies, s’effectuant selon des modalités extraordinaire et
imprévisibles, en particulier par son instantanéité ; mais aussi et dans
le même temps : amener le bénéficiaire et les témoins à rechercher ou à
reconnaitre une signification spirituelle à cet événement, les invitant à
croire en l’intervention spéciale de Dieu.
Ainsi, dans mon dernier livre « Lourdes, terre de guérison »[1],
j’ai fait en sorte de mettre en évidence que ce qui fait la caractéristique des
nombreuses guérisons que je relate sur trois cinquantenaires depuis les
Apparitions, c’est justement le fait de la conversion intérieure, spirituelle, très
forte des guéris, qui montre le caractère miraculeux[2] de
ces guérisons, même si, au final, l’Eglise ne les reconnait pas canoniquement
comme des miracles[3].
De
fait, la guérison physique ne dure qu’un temps (les miraculés n’échappent pas à
la mort), alors que la guérison spirituelle, c’est pour la vie éternelle.
Dans cette
vision des choses, on peut dire sans se tromper que ce qu’on appelle « la
conversion de Paul » est bien de l’ordre du miracle. Ce qui compte avant
tout dans les miracles, c’est la transformation intérieure de la personne, la
conversion au sens radical du terme qui est un retournement à 180 degrés[4].
N’est-ce pas ce qu’a vécu saint Paul, de façon particulièrement forte ? Il
y a un « avant » et un « après ». On a ici l’exemple d’un
miracle pur, de par le passage de Dieu dans la vie de quelqu’un qui le fait
renoncer à lui-même pour être son disciple.
A
partir de ce moment, Paul a adhéré tout le restant de sa vie au Christ Jésus,
devenant « l’apôtre des gentils », envoyé par Dieu pour faire du
christianisme une religion universelle.
Ce n’est pas lui qui l’a décidé, c’est
Dieu qui l’a choisi à travers ce miracle où Il s’est révélé à lui comme
Seigneur et Sauveur.
Cette
conversion est exceptionnelle. Mais elle a pu survenir chez d’autres qui se
sont sentis appelés par Dieu pour réaliser son œuvre.
N’avons-nous
pas, nous aussi, pu être ainsi touchés par la grâce à un moment ou l’autre de
notre vie, poussés alors à nous mettre au service de Celui qui nous appelle ? Pas
forcément de façon aussi sensationnelle, mais par une rencontre qui nous a fait
changer de chemin, fortifiés pour suivre Jésus, avec nos pesanteurs et nos
limites.
La
conversion de Paul ne serait-elle pas le modèle de la propre conversion que
nous avons tous à vivre dans l’ordinaire de nos existences ? Ne bornons
pas les passages de Dieu à l’extraordinaire. Le vent souffle où il veut et
ce n’est pas forcément un ouragan mais peut être, simplement, une brise légère.
Merci
à Bernard Legras de nous avoir exposé ces écrits, ces poèmes et ces œuvres
d’art décrivant la conversion de Paul qui nous mettent devant une réalité que
nous oublions trop souvent mais qui, pourtant, est fondamentale : Dieu est
Vivant, Il agit.
A nous de le
voir.