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Préface du Père Jacques Bombardier

 

 

Vous allez ouvrir ce nouveau livre de monsieur Bernard Legras consacré à la Passion de Jésus Christ : il nous offre d'abord les quatre récits chrétiens de cet événement survenu à Jérusalem, sans doute en l'an 30.

Le 4ème de ces récits – celui de St Jean – est l'œuvre du seul témoin oculaire de cet événement, puisqu'il a suivi Jésus depuis son arrestation jusqu'à sa mise dans le tombeau offert par Joseph d'Arimathie. Très inséré dans la société de Jérusalem, notamment dans le milieu des prêtres, Jean put même faire entrer l'apôtre Pierre chez le Grand-Prêtre Hanne – organisateur de la « liquidation » de Jésus – et lui permettre d'être tout proche de son ami et maître Jésus, pendant son interrogatoire dans la demeure d'Hanne jusqu'à sa peur et son reniement.

La présentation du Christ dans sa Passion est sans doute d'une très grande difficulté. Jésus est habituellement très réservé sur lui-même, d'une discrétion étonnante, laissant assez peu paraître ses sentiments intérieurs. Et comment comprendre une personnalité si exceptionnelle ?

St Jean nous le montre, dans sa Passion, extrêmement maître de lui-même, impressionnant même, puisque les soldats reculent et tombent après sa réponse dans le jardin: « c'est moi ! » Et cette maîtrise dure pendant la passion et même sous les coups effrayants qu'il subit, dans un climat de dérision et de haine de la part des autorités juives… et de mépris du côté de Pilate.

St Marc – et nous savons que Marc transmet la catéchèse de Pierre et que c'est le prince des apôtres qui parle dans son Evangile – insiste lui sur l'autre aspect de l'attitude de Jésus, l'atrocité de supplices qu'on lui inflige en toute injustice, doublant la terrible flagellation par le crucifiement, ce qu'on ne faisait jamais. St Marc et St Matthieu nous mettent sous les yeux la violence haineuse inouïe que Jésus a subie… St Luc la suggère sans la décrire aussi explicitement, comme par pudeur et, sans doute, par affection pour le maître.

La difficulté de rendre par écrit – et plus tard par tableau – la réalité de cet événement est immense … chaque évangéliste soulignant un des aspects de cette mort : Matthieu et Marc font voir le Christ partageant la douleur de tout homme mourant, même jusqu'à se sentir abandonné de Dieu : « Mon Dieu Mon Dieu pourquoi m'as-tu abandonné ? » .

Luc insiste lui sur la confiance du Christ qui d'abord pardonne à ses bourreaux : « Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font . puis s'abandonne entre les mains de son Père : « Père entre tes mains je remets mon esprit. »

Jean lui, voulant nous montrer l'extraordinaire maîtrise de lui de Jésus et sa sérénité intérieure plus forte que tout puisque reposant sur sa confiance absolue dans le Père, nous présente le Christ confiant sa mère à son meilleur ami Jean et mourant non pas en expirant, mais en « remettant son esprit » activement … le dernier souffle du Christ devenant le souffle de l'Esprit qui aime la petite Eglise assemblée au tour de la croix .

Toute mort est toujours si extraordinaire que ceux qui y assistent, sont engloutis par l'événement et l'émotion qu'ils ressentent… et l'événement si subit et si bref, échappe toujours... On peut rendre grâce aux quatre écrivains inspirés qui nous l'ont transmis le plus délicatement et le plus précisément possibles, je dirais le plus humblement possible.

Et alors jaillit l'immense parole humaine qui va essayer à son tour de méditer poétiquement ou de « rendre » l'Evénement. Tous les siècles l'ont fait, en Orient comme en Occident, avec leurs moyens et leur sensibilité… dans les premières hymnes chrétiennes chez St Paul ou St Jean : pensons aux hymnes pauliniennes et au Prologue de l'Evangile de St Jean mais aussi aux Odes de Salomon… ou aux splendides poèmes de St Ephrem le Syrien. Puis vinrent les icônes en Orient et en Occident jusqu'à la révolution de la peinture du Quattrocento italien. Chaque siècle contemple la scène, la comprend, la ressent et l'exprime avec les sensibilités de son temps…. Le romantisme de Chateaubriand et l'austérité de Pascal, le verbe enthousiasmant de Péguy ou le témoignage de Eric-Emmanuel Schmitt… aussi bien que le style hugolien si connu.

Ce livre qui allie poésie ou texte méditatif, et peinture nous fait entrer avec gravité et admiration, dans la contemplation de cet événement. En lisant le poème et en nous arrêtant devant la peinture choisie dans une très grande diversité, chacun est appelé à contempler et à laisser l'événement comme « entrer en lui ».

Je souhaite à tout lecteur une belle contemplation de cet événement christique si bouleversant, si touchant et si transformant.

 

Le Père Bombardier est Prévôt des Pères de l'Oratoire de Saint Philippe Néri de Nancy , curé de la paroisse Saint-Epvre de Nancy, membre de l'Académie Stanislas ; il a enseigné l'histoire de l'Eglise au séminaire diocésain. Directeur et auteur de Histoire des Sœurs de la Doctrine Chrétienne de Nancy  (5 vol., 1988-1999).

Entête du Psaume 21 qui finit, certes, dans la paix et la vie mais passe par la douleur de se croire abandonné de Dieu lui-même. St Matthieu 27/46 et St Marc 15/33

St Luc 23/34

Psaume 30 prié ou « crié » par Jésus au moment de sa mort en St Luc 23/46

St Jean 19/30

Epîtres aux Ephésiens 1/1-12, aux Colossiens 1/12-20 et aux Philippiens 2/6-11

Evangile selon St Jean 1/1-18